Newsletter mai 2021
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Infirmière en réanimation, Anne-Sophie témoigne
Depuis plus de 10 ans au service des patients les plus fragiles, Anne-Sophie nous livre son combat quotidien en réanimation à l’Hôpital Cochin (Paris) et son engagement aux côtés de101.
101 : Bonjour Anne-Sophie, tout d’abord pouvez-vous nous expliquer les raisons pour lesquelles vous travaillez aujourd’hui en réanimation ?
Anne-Sophie Debue : « La raison principale, c’est l’équipe ! En réanimation, les soignants travaillent tous ensemble, chacun est un maillon irremplaçable et cette dynamique est extrêmement enrichissante. En tant qu’infirmière, c’est également l’une des rares spécialités où l’on peut s’occuper du patient dans sa globalité : la réa nécessite de maîtriser des techniques mais également d’avoir une grande humanité. C’est une spécialité où l’on doit toujours être à la pointe de la technologie tout en se confrontant aux extrêmes de la vie humaine. La réanimation, c’est un endroit où l’on se confronte chaque jour à notre condition humaine. C’est un métier passionnant. »
Mais ce métier n’est pas simple et il comporte de nombreuses difficultés :
« Le plus dur c’est le manque de personnel, de moyens et de temps. De ne pas avoir les moyens de faire aussi bien qu’on le pourrait avec juste un peu plus. C’est usant. Passer en coup de vent dans une chambre où le patient ou sa famille ont besoin de parler mais ne pas pouvoir se libérer pour prêter une oreille vraiment attentive. Courir après du matériel quand on pourrait passer ce temps à faire un soin de confort. Courir. Tout le temps. Et perdre le sens de ce qu’on fait à force de n’avoir pas le temps de le faire bien. »
101 : La pandémie de la Covid-19 a mis en lumière les services de réanimation et révélé l’importance de ce service aux yeux du grand public. De nombreuses actions ont été menées pour vous aider. Pour vous, quelle a été la plus grande difficulté en cette période de crise ?
ASD : « Cette période n’a fait que renforcer les manques qui existent depuis longtemps maintenant à l’hôpital. Soigner des personnes encore plus malades avec encore moins de personnel formé et de moyens. Ce qui est le plus problématique dans cette pandémie c’est la difficulté du grand public à comprendre qu’un soignant de réanimation, c’est un soignant avec des compétences particulières. En général, les gens comprennent assez bien qu’un chirurgien cardiaque et un neurologue ne soient pas interchangeables. Et pour les infirmiers c’est la même chose.
L’autre élément c’est qu’ouvrir des centaines de lits de réanimation n’est pas non plus une solution : la réanimation ce n’est pas anodin. Un passage en réanimation engendre des semaines d’inconfort et de souffrance puis des mois de rééducation et de récupération physique mais aussi psychique. L’objectif devrait être de limiter autant que possible les hospitalisations en réanimation tout en rendant possible le fait de prodiguer les meilleurs soins, ceux qui limiteront au maximum les séquelles et pour cela, ce qui importe c’est de disposer de personnel formé et en nombre. »
101 : Qu’est-ce qui vous fait tenir pour sauver toutes les vies qui peuvent être sauvées ?
ASD : « Ma motivation je la puise dans l’équipe et l’incroyable alchimie qui se produit lorsque l’on réunit nos efforts, nos énergies et notre enthousiasme autour d’un même but. Les histoires humaines que l’on croise quotidiennement, les belles rencontres. Et les jours où l’on sait qu’on a fait la différence, qu’on a apporté quelque chose de plus. »
101 : Anne-Sophie, vous êtes bénévole pour 101 depuis près de trois ans maintenant (ndlr : 101 a été créé début 2018). Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous engager aux côtés du premier fonds international entièrement dédié au progrès de la réanimation ?
ASD : « Je suis 101 depuis les origines, j’ai participé à de nombreuses opérations de formation du grand public aux gestes qui sauvent, j’ai coordonné des équipes de formateurs au sein de ces opérations, et plus récemment nous travaillons sur un très beau projet qui devrait bientôt voir le jour... n’en disons pas plus mais sachez qu’il allie encore une fois technologie et humanité, avec une ambition concrète d’améliorer le vécu des proches et des patients ainsi que de limiter les conséquences néfastes du choc psychologique que constitue le passage en réanimation. Affaire à suivre de très très près !
Si j’ai rejoint le réseau de 101 c’est parce qu’il est important que le grand public perçoive mieux ce qu’est la réanimation, ce que sont les enjeux de cette spécialité. Parce que 101 soutient la recherche scientifique et médicale mais aussi la recherche qui vise à améliorer les soins et le soutien des proches et des familles. Parce qu’il y a plein de choses à améliorer dans mon quotidien de soignante pour me permettre de faire mieux mon travail et que 101 me permet de m’engager concrètement pour faire advenir ce changement. »
101 : Anne-Sophie, un dernier mot pour la fin ?
ASD « Pour finir, je tenais à remercier Jean-Daniel Chiche, le Président de 101, pour son travail acharné pour ses équipes, ses patients et leurs proches, ainsi que pour faire reconnaître les missions de la réanimation par tous. Jean-Daniel est une personne aussi extraordinaire que passionnée et il suffit de s’enthousiasmer avec lui pour qu’il vous entraîne dans sa suite dans des aventures qui font changer le monde tout en contribuant à donner du sens à nos soins quotidiens. Mais tout le monde n’est pas larger than life et pourtant, croyez-moi, à l’échelle individuelle, il ne faut pas sous-estimer l’importance du discret travail qu’effectue chacun de mes collègues, infirmiers, aides-soignants, kiné, internes, chefs de clinique, à leur modeste manière. Ils m’inspirent quotidiennement par leurs gestes attentionnés, par leur patience et leurs mots choisis, leur humour et leur finesse, leur façon de gérer leurs émotions et leur soutien sans faille. Merci à vous tous de partager ce drôle de métier. »
Merci à Anne-Sophie Debue pour ce beau témoignage !
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